Préambule

Jeudi 5 Septembre 2013, à peu près 2 heures du matin et mon sac est enfin prêt après avoir esquivé à plusieurs reprises de le remplir (il doit y avoir une relation assez simple entre le niveau de ma bière et celui du sac : une fois vidée le sac est plein).

Nos deux sacs font environs 15kg chacun et en théorie devraient couvrir les 12 jours qui nous attendent au milieu de nulle part (nulle part étant approximativement dans les régions montagneuses du centre de la Norvège où s’étend le parc national de Dovrefjell).

Beaucoup d’interrogations à propos de nulle part. Va-t-il faire -5°C ou bien 10°C? Y-a-t-il des gens? Y-a-t-il des ours? Si oui combien? Le fait qu’il n’y ait pas de gens est-il lié au fait qu’il y ait des ours? Est-ce que se poser des questions inutiles sur nulle part augmente les chances de survie face à un ours? Quel est le sens de la vie? Nous tenterons de résoudre tous ces mystères.

On est toujours à Paris et je me réveille vers 7h30, Faltad se réveille 30 secondes, le temps de lancer la commande magique !fz de m1ch3l (le robot IRC le plus intelligent de ##sbrk, par pure coïncidence c’est aussi le seul) pour vérifier la météo en haut du Snøhetta, une des montagnes faisant partie de nos objectifs. Apparement rassuré, Faltad se rendort pour quelques minutes, genre non, je ne viens pas de me réveiller et je dors profondément depuis environs toujours.

Pas mal d’agitation sur le chemin qui mène à la station de RER et pour cause le marché avec plein d’odeur de nourriture cool. Je n’ai jamais faim le matin mais aujourd’hui pour une raison inconnue, j’ai faim, j’ai faim, j’ai faim, j’ai faim, et j’ai toujours faim même quand je dis que j’ai faim. On s’imagine que dans quelques heures, tous ces gens seront bien loin et on prend notre mal en patience.

Dans le RER matinal silencieux rempli de monde allant au travail, une femme un peu voir beaucoup bizarre mais non moins intéressante s’engage dans un monologue cryptique, interpelant à tour de rôle des gens au hasard dans le wagon avant de poser à Faltad une question pleine de sens qui restera dans les mémoires de tous les spectateurs: “Vous aussi vous allez à la city en Quechua?”.

On se plante de terminal arrivé à l’aéroport mais vu qu’on est en avance on a quand même le temps d’acheter deux maxi pains au chocolat, c’est bon. Le pilote s’appelle Mister Erikson: pas de doutes on est dans le bon avion.

Arrivé à Oslo, première phrase de Faltad: “J’ai jamais vu autant de Norvégiens de toute ma vie”. Moi j’ai l’impression d’être en Suède car il y a des odeurs de cannelle partout.

On va récupérer nos sacs, et je vois le mien qui glisse du tapis pour s’écraser contre une des parois, ça me fait marrer car je me dis qu’il souffrira beaucoup plus par la suite. Environs 3 secondes plus tard j’ouvre mon sac et là, c’est l’explosion de grains de riz, il y en a partout (j’avais intelligemment mis tout au fond du sac un des paquets de 1kg), et oui, j’ai l’air d’un con.

Comme l’imbécile qui écrit ces lignes est le même que celui qui a pris les billets de train, on doit attendre trois heures à l’aéroport avant de sauter dans le train pour Dombås, du coup on essaye de trouver à manger pas cher mais c’est impossible. Le cours du paquet de chips atteind les 6 euros, un record mondial. On prend 9 “bolles” (des choses rondes, sucrées, avec du chocolat et de la cannelle), c’est bon.

On tourne en rond et 3h plus tard on est dans le train pour nulle part, qui est rempli de gens bizarres qui roulent des R comme pas permis. Le train est lent comparé à ce qu’on a en France, il doit aller au maximum à 120km/h en descente avec le vent dans le dos.

On longe de grands lacs à la sortie d’Oslo (qui se prononce Oshlo) et petit à petit on commence à prendre de l’altitude: à chaque station est affichée l’altitude courante qui atteindra les 600 m.o.h (Meter Over Havet) une fois arrivé à destination. Contrairement à ce que j’imaginais naïvement, tout le long de la ligne de train est industrialisé, on a l’impression que le pays existe depuis 2 semaines et qu’il est toujours en cours de construction.

On arrive à Dombås vers 20h30 (il fait alors presque nuit) et on cherche à manger ainsi qu’un coin pour passer la nuit. On trouve un Bunnpris (avec un peu d’imagination on se dit que ça veut dire “Bon prix”, à ce rythme on va vite progresser en Frih Deh Bi De Uh!).

Deux bonnes heures plus tard, on est au bord d’un torrent sur une petite plage de sable au milieu d’une forêt, en train d’essayer de faire du feu. On galère, mais vraiment. On abandonne à plusieurs reprises, et on retente avec différentes approches non moins inefficaces. 30 minutes et 3 cloques aux doigts plus tard, j’arrive à avoir un feu capable de faire sortir la graisse des saucisses les moins chères du Bunnpris. Il doit être 23h30 quand on s’endort, et pour l’instant, il fait toujours chaud.

Note pour le Sébastien du futur qui relira peut-être ces mots: quand on se brosse les dents avec une lampe frontale de nuit, ne pas plonger la tête sous l’eau pour se rincer la bouche, ça peut faire des chocapics.

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